Un nouveau traitement qui modifie génétiquement le système immunitaire du patient pour lui permettre de devenir un « tueur de cancer ».
Le Centre Henri Becquerel et le CHU de Rouen font partie, depuis quelques mois, des rares établissements de France autorisés à utiliser le traitement par CAR-T cells. Celui-ci constitue une avancée majeure dans la prise en charge des lymphomes et leucémies réfractaires aux traitements conventionnels.
Qu’est-ce que le traitement CAR-T cells ?
Le traitement par CAR-T cells (ou cellules CAR-T) constituent une nouvelle forme d’immunothérapie très innovante.
Le principe repose sur la modification génétique en laboratoire du système immunitaire du patient, en introduisant un gène dans ses Lymphocytes T, ce qui leur confère trois compétences :
1. RECONNAITRE les cellules cancéreuses
2. S’ACTIVER contre ces mêmes cellules cancéreuses
3. DETRUIRE efficacement les cellules cancéreuses
Ce traitement est totalement PERSONNALISE. Les CAR-T cells sont produites à partir des lymphocytes T du patient et sont EXCLUSIVEMENT utilisées pour ce patient. Etant donné que ce sont ses propres cellules que l’on lui réinjecte, elles sont donc reconnues et acceptées par son organisme.
Indications au Centre Henri Becquerel
Pour quelles pathologies ?
Les indications pour les 1ers patients ne concernaient que certains types de lymphomes et leucémies et ont été élargies aux lymphomes folliculaires, aux lymphomes à cellules du manteau en 3eme ligne, aux lymphomes diffus à grandes cellules dès la première rechute. Des données scientifiques ont montré la supériorité de cette procédure face à l’autogreffe dans les lymphomes diffus à grandes cellules. D’autres indications notamment dans le myélome seront probablement mis en place dans les mois à venir.
Pour quels patients ?
Ce traitement s’adresse à des patients adultes qui ont déjà reçu au moins deux traitements préalables, chez qui la maladie a récidivé ou n’a pas évolué favorablement. De plus, la possibilité pour un malade de recevoir ce traitement dépend aussi de son état de santé, il faut s’assurer qu’il aura la capacité de supporter ce traitement très lourd. Il permet la guérison dans un nombre de cas significatif (30 à 40% pour les lymphomes) chez des patients résistants à tous les traitements conventionnels.
D’autres stratégies basées sur l’utilisations d’anticorps de nouvelles générations (anticorps dits « bispécifiques ») sont également des traitements très prometteurs et viendront compléter l’arsenal thérapeutique, notamment en cas de rechute après CAR-T cells, mais pourraient aussi à terme venir concurrencer cette thérapie.
Situation en septembre 2022
Le premier patient a été traité au Centre Henri Becquerel le 14 novembre 2021.
Depuis, près de 20 patients ont reçu un traitement par CAR-T cells et sont suivis de manière rapprochée en Hôpital de Jour après leur traitement.
Toute une équipe mobilisée
Compte tenu de sa complexité, ce traitement implique la mise en coordination de nombreux professionnels : médecins hématologues, neurologues, immunologistes, réanimateurs, pharmaciens, infirmière de coordination et une équipe paramédicale expérimentée. Il implique la synergie des acteurs répartis sur 3 sites distincts : le Centre Henri Becquerel, le CHU de Rouen et l’EFS. Chaque semaine une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire est organisée pour l’identification et le suivi des patients.
Le traitement, délivré sous forme d’une perfusion unique, est réalisé en unité de soins intensif d’hématologie et peut se compliquer de manifestations sévères comme de la fièvre ou des signes neurologiques conduisant parfois à un transfert en réanimation.
Un long parcours d’accréditation
Au-delà de la question du coût qui est très important, cela explique que ce traitement ne puisse être pratiqué que dans certains établissements, dits centres QUALIFIES, qui disposent d’équipes formées et des équipements nécessaires.
La mise en œuvre de cette activité de pointe a nécessité un long processus. Le Centre Henri Becquerel a tout d’abord dû être accrédité auprès des deux laboratoires pharmaceutiques en capacité de produire des CAR-T cells, puis il a fallu faire évoluer le cadre réglementaire spécifiquement pour notre établissement.
Nous avons obtenu l’autorisation de réaliser ce traitement en raison de notre expérience déjà bien établie depuis plus de 30 ans dans la greffe de moelle osseuse.
Une réussite qui aurait été impossible sans le soutien actif auprès du Ministère de la Santé, de l’ARS Normandie, du CHU de Rouen, de la Fédération des Centres de Lutte Contre le Cancer (UNICANCER) et de plusieurs associations de patients telles que France lymphome espoir (à présent ELLYE) et la Ligue contre le Cancer 76.